L’état de Californie a saisi en justice le studio de jeux vidéo Activision Blizzard pour harcèlement sexuel et discrimination salariale. Ayant d’abord réfuté ces accusations, les dirigeants du groupe ont finalement fait machine arrière face aux manifestations des employés et de la communauté des joueurs.
Une entreprise dominée par la Bro Culture et les inégalités
C’est l’aboutissement de plusieurs années de tension et d’omerta : le 22 juillet 2021, Activision Blizzard a été rappelé à l’ordre par la justice californienne. Les faits qui sont reprochés au géant du jeu vidéo sont sérieux :
- harcèlement sexuel ;
- inégalités dans la gestion des carrière ;
- implication dans le suicide d’une employée ;
- et enfin… « Bro culture », également appelée « boys club. »
Littéralement, « Bro culture » signifie « culture des frères. » Ce terme est notamment employé pour désigner l’ambiance de certaines entreprises de la Tech, implantées dans la Silicon Valley. Des sociétés dirigées par des hommes au comportement machiste, encourageant un esprit ultra-compétitif, au détriment de la gent féminine.
Chez Activision Blizzard, cette Bro culture s’incarne dans des comportements potaches, humiliants et sexistes. Il est, par exemple, fait état d’employés masculins arrivant saouls au travail, jouant aux jeux vidéo pendant les heures de bureau, plaisantant sur le corps des femmes et sur le viol…
Une employée s’est par ailleurs suicidée après un revenge porn de son ancien manager. Plusieurs hauts cadres ont également créé l’indignation sur les réseaux sociaux, après que des photos de la « Cosby Suit » aient été révélées. Il s’agit d’une chambre, louée à l’occasion d’événements corporate, qu’ils avaient décorée et nommée en « l’honneur » de l’acteur Bill Cosby, condamné pour agression sexuelle. Leur objectif était, comme indiqué dans leurs conversations WhatsApp, d’y ramener des « hot chixx » – littéralement, des « chaudes poulettes. »
La production des jeux est mise en pause chez Activision Blizzard
Après avoir été informée de ces plaintes, l’entreprise a tout d’abord partagé un communiqué de presse pour contredire ces accusations qu’elle jugeait infondées. Une réaction pour le moins maladroite, à laquelle les collaborateurs d’Activision Blizzard ont répondu par une lettre ouverte dénonçant le management abusif et les comportements borderline. Pas moins de 2 000 employés ont déjà signé cette pétition, qui a été suivie par un mouvement de grève.
Salariés et ex-salariés du groupe ont manifesté devant le Siège, tandis que la communauté de joueurs a appelé au boycott des licences phares du Groupe telles que WoW (World Of Warcraft) et Call of Duty. Suite à ces mouvements de contestation, Bobby Kotick, PDG du Groupe, a partagé un communiqué dans lequel il s’est excusé, et s’est engagé à améliorer la politique interne. Une cellule de crise a été mise en place avec l’aide d’un cabinet d’avocat.
Quel avenir pour l’industrie du jeu vidéo ?
Depuis plusieurs mois, les voix des salariés du monde du Gaming s’élèvent de plus en plus contre ces pratiques. Cette affaire fait d’ailleurs écho aux accusations de harcèlement institutionnel envers le groupe Ubisoft, dont nous vous avions parlé très récemment.
Les salariés de la firme française ont publié une lettre ouverte pour adresser leur soutien à leurs confrères américains, Activision Blizzard. Ils y mentionnent une « culture répandue et profondément enracinée de comportements abusifs » et ont interpelé Yves Guillemot, PDG d’Ubisoft.
Leur souhait serait de voir les acteurs majeurs de l’industrie du jeu vidéo se réunir afin de créer une charte commune, regroupant les règles et processus à suivre, et assurant la protection des salariés, notamment via des syndicats. Affaire à suivre concernant Activision Blizzard !